« Nous appelons à l’élaboration d’une loi sur les bibliothèques qui soit une véritable reconnaissance de leur action dans l’éducation culturelle et populaire afin que leur existence s’impose aux collectivités territoriales ou à l’Etat »
Depuis bientôt un an, nos collègues bibliothécaires et les habitants de Grenoble se mobilisent pour contrer un plan d’austérité dirigé entre autres services contre le réseau des bibliothèques. Leur mobilisation a permis de sauver une des trois bibliothèques menacées. Mais huit postes ont été supprimés, et deux bibliothèques vidées de leurs collections (ici). C’est donc avec stupéfaction que nous découvrons que l’ABF (Association des Bibliothécaires de France) invite, à l’occasion de son congrès, le maire de cette ville, Eric Piolle, pour qu’il réponde à la question : « fermer une bibliothèque est-ce une source d’inégalité ? ». Sans attendre sa réponse, nous affirmons que oui.
Car ces fermetures ne procèdent que d’une logique purement comptable de la société, faisant fi des conditions de travail et de la qualité du service rendu. Conséquence : face à l’absence d’une politique culturelle ambitieuse, la marchandisation du bien commun gagne du terrain et condamne les bibliothèques à devenir des supermarchés culturels cédant aux sirènes du marketing.
La lecture publique pour toutes et tous en voie de disparition. À Grenoble, la fermeture des bibliothèques dans des quartiers populaires a déjà des conséquences lourdement dommageables. L’acte de lire ne se décrète pas, susciter le désir de lecture est un travail de longue haleine. Priver les citoyens des quartiers populaires d’équipements de proximité, c’est renforcer l’éloignement du livre et de la culture, c’est amplifier la relégation d’une partie de la population. Et les bibliothèques de Grenoble ont beau être labellisées Bibliothèques numériques de référence, le numérique ne remplacera jamais ces lieux de vie que sont les bibliothèques de quartier.
Alors qu’aujourd’hui les bibliothécaires parviennent à toucher un public plus large que la plupart des institutions culturelles, on assiste à un véritable démantèlement de la lecture publique. Au delà de Grenoble, on ne compte plus les bibliothèques menacées de fermeture, les équipes largement précarisées, qui ne cessent de diminuer, les budgets amputés parfois de moitié.
Non au travail du dimanche et aux bibliothèques supermarché ! Cette litanie de nos élites d’ouvrir les bibliothèques le dimanche ne remplacera jamais les bibliothèques de quartier et l’articulation fine et régulière des différents lieux de lecture. Nous tenons donc à rappeler notre opposition ferme au travail du dimanche. Le repos du dimanche n’est pas négociable, il est le fruit des luttes sociales qui ont construit notre présent. Seul jour de repos commun il doit permettre à chacun et chacune de disposer de son temps comme bon lui semble. Le travail dominical doit être réglementé, largement compensé et surtout rester exceptionnel. Car, nous n’en doutons pas, les bibliothèques, comme les commerces, ne sont qu’une étape supplémentaire vers la généralisation du travail le dimanche. Ce qui réduit à néant tous les arguments sur le « volontariat » ou une « meilleure rémunération » : quand la plupart des salarié-e-s travailleront le dimanche ces compensations seront hors de propos.
Et puis, quel est le but de cette proposition ? S’agit-il d’autre chose que d’heures de prêt supplémentaires ? Rappelons-le les bibliothèques, du moins en milieu urbain, sont déjà largement ouvertes en soirée et le samedi. Et trop souvent nous manquons de temps pour mener à bien les différentes tâches qui nous incombent. Et c’est à nous ensuite d’assumer l’incomplétude des collections auxquelles, quoi qu’en pensent certains, les usagers sont attentifs, les erreurs dans le suivi de leurs demandes, les documents abîmés, sales ou mal classés… Nous refusons de plus la rationalisation et la centralisation du travail en médiathèque, qui, comme l’ont dénoncé nos collègues de Plaine Commune, hiérarchise et parcellise le travail. Nous souhaitons enfin avoir une vision du public autre que celle d’une masse qu’il faut gérer.
Pour une autre politique de la lecture publique. Si l’accès pour toutes et tous à la lecture publique est véritablement l’enjeu des débats, d’autres voies sont à soutenir : la multiplication des lieux de proximité, la gratuité d’accès, les services à domicile, les actions hors les murs, le temps pour construire des partenariats durables et constructifs, pour maîtriser et apprécier les contenus, les outils et les animations que nous proposons, pour connaître les différents publics auxquels nous nous adressons. Du temps aussi pour la formation à un métier, qui certes évolue, mais avec quels moyens et dans quelles conditions ?…
Plutôt que d’ouvrir plus, ouvrons mieux ! Nous défendons en effet une augmentation du nombre d’agents dans les bibliothèques en place, pour développer les activités que nous jugeons essentielles : les animations, les ateliers, la programmation culturelle, les temps de préparation, les commandes, les déplacements, la lecture, la mise en valeur des fonds… Si nous appelons à l’élaboration d’une loi sur les bibliothèques, afin que leur existence s’impose aux collectivités territoriales ou à l’état, nous voulons que cette loi soit une véritable reconnaissance de leur action dans l’éducation culturelle et populaire et non une entrave à la constitution et à la mise à disposition de fonds ou une casse des droits des salariés.
Texte d’un collectif de bibliothécaires et de syndicats dont la CGT qui sera distribué au Congrès de l’ABF, 15-17 juin 2017, Paris, Porte de Versailles
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